mardi 17 septembre 2013

La pièce ’’Mathilde’’ à l’Institut français du Bénin

Guy-Ernest Kaho et Sophie Mêtinhoué réussissent leur jeu


La paillote de l’Institut français du Bénin, ce samedi 14 septembre 2013, a accueilli un public ayant effectué un déplacement massif  pour suivre ’’Mathilde’’, la représentation théâtrale du weekend. Ce public a eu l'occasion de constater le caractère impressionnant de Guy-Ernest Kaho et Sophie Mêtinhoué, les deux acteurs principaux de la pièce.





Mise en scène par Isidore Dokpa, ’’Mathilde’’ relève d’une pièce de théâtre écrite par la dramaturge française, Véronique Olmi. Ont évolué sur la scène de la Paillote de l’Institut français du Bénin, ce samedi 14 septembre, Guy-Ernest Kaho, dans le rôle de Pierre, mari, médecin-cancérologue, et Sophie Mêtinhoué, Mathilde sur scène, écrivain et épouse du précédent.
Après avoir purgé trois mois de prison pour détournement de mineur, elle se retrouve au domicile de son époux où celui-ci a soigneusement rangé, par catégorie, ses affaires dans des cartons ostensiblement présentés. La réussite du jeu de chacun de ces deux acteurs béninois bien connus est perceptible, d’une part, à travers la capacité de Guy-Ernest Kaho à incarner ce mari qui, bien qu’encore marqué par l’adultère de sa femme, ressent et exprime un fond d’amour pour elle, une expression ambiguë qu’il a su faire contraster avec une curiosité maladive sur les circonstances des relations intimes entre Mathilde et son jeune amant de 14 ans. Le triple humour de mots, de gestes et de caractère qu’il déploie, dans un naturel du personnage, un naturel mené dans une aisance remarquable, appuyée par une diction et une gestuelle acérées, montre que cet acteur s’est enrichi, au fil des années, d’une expérience dont la solidité en impose.
D’autre part, Sophie Mêtinhoué a ému le spectateur par son adresse dans l’expression remuante et volcanique, vu sa gestuelle multidimensionnelle, du ressenti du plaisir sexuel, des phases d’un orgasme dont les moindres méandres se distribuaient en elle sous l’action d’un amant adolescent qu’elle a su rendre présent et dont elle a suggéré que la vigueur physique et sexuelle ne faisait aucun doute ; cette actrice a pu investir et rentabiliser l’espace, dans ses tous compartiments visibles, tout en jouant ardemment de sa personne pour faire envier son statut d’amante sexuellement comblée.

Dans la sincérité de son jeu de scène, cette Sophie Mêtinhoué n’avait plus aucune commune mesure avec celle de la pièce, ’’Le dernier pas’’, pièce de Moussa Konaté, jouée le 25 mars 2008, à l’ex-Centre culturel français de Cotonou, lors de la neuvième édition du Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb). Elle y avait incarné le rôle de Safou, toujours avec Ernest Kaho, jouant Seiba, son conjoint ; elle y manquait d’une assurance qu’elle a énergiquement exploitée, ce samedi 14 septembre, démontrant une maturité artistique dont l’avenir pourra décider du développement, surtout si elle se trouve à jouer dans une autre pièce, sans Ernest Kaho, et mise en scène par une personne autre qu’Isidore Dokpa.       


Marcel Kpogodo

mardi 3 septembre 2013

Isdeen Adamon tient son concert à l'Institut français du Bénin

Quand l’ ’’Afro-houngan’’ électrise et ’’scotche’’


La soirée du samedi 13 juillet a permis à Isdeen Adamon et à son orchestre, ’’Mètalokan’’, de se produire à la Paillote de l’Institut français du Bénin. A la fin du concert, le public en redemandait.


Isdeen Adamon, en pleine démonstration de son talent de chanteur et de guitariste
L’ ’’Afro-houngan’’ a plu et émerveillé ! C’est une musique développant un rythme proche de la musique Afro-beat du Nigeria, seulement qu’avec le tam-tam ’’Houngan’’ des régions lacustres du Bénin, une saveur authentique se dégage et permet de rétablir une certaine spécificité. En effet, l’absence des tambourins que les percussionnistes jouent, accrochés à l’épaule, enlève à l’ ’’Afro-houngan’’ des relents de ’’Djoudjou music’’ que le saxophone avait tendance à appeler de tous ses vœux.
Par ailleurs, la paillote de l’Institut français du Bénin a vibré au rythme d’une musique joyeuse et joviale, enivrante qui ne laissait pas indifférent. Aussi bien la batterie, menée de main de maître par Arnaud Ngoutta, le saxophone aux notes harmonieusement déclamées par David Sax, que le piano d’Achille Bilandou, la guitare basse de Mariano Hintègni et le chœur rythmé à la cascagnette d’Aubierge et de Blanche, complétée par les percussions ’’Houngan’’, voilà l’arsenal qui a dévoilé au public une musique qui vous entrait dans toutes les parties du corps, qui y était ressentie avec une puissance telle que ce corps n’avait pas d’autre choix, pour retrouver son équilibre du moment, que de bouger dans le sens de ce que les sens permettaient de percevoir comme rythme. Ce malingre noiraud aux dreadlocks d’Isdeen a piégé le public par une voix dont le timbre, avec le temps, se raffinera davantage, mais qui a proféré des morceaux en Yoruba, en Fongbé, en Anglais, notamment, distillant une joie de vivre communicative qui semble avoir emballé les plus réticents du public.

El-Rego, en scène
Entre temps, le grand El-Régo a fait son apparition, enveloppé des propos d’hommage de l’artiste du jour. Au départ du Doyen, l’ambiance Afro-houngan a repris de plus belle scène, électrisant Madame l’Ambassadeur de la France au Bénin, les Directeurs de la Cinématographie et de l’Ensemble artistique national, tout autant que le public qui, le top donné pour rejoindre le domicile, s’est vu comme ’’scotché’’ à son banc, refusant de vider les lieux et redemandant de cette ambiance musicale chaleureuse et vivifiante. Le signe d’une réussite totale pour Isdeen et ’’Mètalokan’’.
Cet orchestre, apparemment, déploie un mode de fonctionnement scénique qui ne noie pas tous les talents instrumentaux et vocaux dans et derrière l’image de la tête de pont qu’est Isdeen. Pour le concert de ce samedi 13 juillet 2013, cet artiste, qui sait aussi vigoureusement jouer du houngan, avait fait déplacer tout son arsenal, un orchestre apparemment ordinaire, mais de haute facture dont les membres ont déployé une énergie à la fois individuelle et collective, mettant en jeu une symbiose réconfortante. Rien n’y a été laissé au hasard, même l’accoutrement. Isdeen Adamon a laissé sa double potentialité de guitariste et de percussionniste exploser et a permis que, particulièrement, David Sax, Mariano Hintègni, Arnaud Ngoutta, Achille Bilandou, et même les deux choristes, les deux danseuses et les trois autres percussionnistes fassent leur show, chacun de son côté, de quoi révéler au public que chaque membre de l’orchestre appartenait à un véritable puzzle. Cette générosité d’Isdeen a payé : à la fin du concert, tout le monde allait le féliciter. Reste à Sourou Noudogbessi, son manager et celui de ’’Mètalokan’’, de jouer une partition de promotion de la sensibilité musicale d’ ’’Afro-houngan’’, à l’échelle sous-régionale et internationale. 

Marcel Kpogodo

Parution de "La Nubie et les origines des peuples d’Afrique"

N’Piénikoua Marcus Boni Teiga fait comprendre l’histoire africaine


Paru aux éditions Dagan en 2013, l’ouvrage ’’La Nubie et les origines des peuples d’Afrique’’, Tome1, du Journaliste-écrivain béninois N’Piénikoua Marcus Boni Téiga, est préfacé par le professeur  Charles Bonnet, membre de l’Institut de France (Associé étranger à l’académie  des inscriptions et Belles Lettres). C’est une enquête historique qui apporte la contribution de l’auteur à la compréhension d’un pan de la culture africaine.  



Contenant 165 pages, il est structuré en 7 chapitres : « Aux origines de la Nubie », « La Nubie et les grandes migrations humaines », « La Nubie et Gambela », « La Nubie et ses royaumes », « La Nubie et l’Egypte », « Les conquêtes Nubiennes et les descendants de Nubiens en Afrique » et « Les descendants de Nubiens de la Diaspora ». Ceux-ci se répartissent en sous-titres.
La publication de cet ouvrage, selon l’auteur, N’Piénikoua Marcus Boni Teiga, est le résultat d’une vingtaine d’années d’investigations de terrain, de recherches documentaires, d’analyses et d’études comparées. Il poursuit en affirmant que c’est une réponse à une question qu’il a longtemps trainée, une question relative à l’origine de ses ancêtres appartenant au « Natemba ». Ainsi, à partir des sources orales qu’il a recueillies au Bénin, au Togo, au Burkina-Faso, au Niger, au Ghana, au Tchad, en Centrafrique, au Cameroun, au Nigéria, au Kenya, en Ouganda, en Ethiopie, en Egypte et des recherches analytiques et comparatives avec d’autres peuples, il a essayé de reconstituer, à travers l’ouvrage, les liens  qui ont pu exister entre les Natemba et d’autres peuples.
« Je ne suis pas de ceux qui pensent que le fait que les Africains n’aient pas développé l’écriture plus tôt les empêche fondamentalement de reconstituer leur histoire avec des sources orales », se justifie-t-il. « Le Nara » langue des anciens « pharaons noirs », rois de Napata et de Méroé, les peuples Sara du Tchad, sont deux éléments majeurs qui ont permis à l’auteur de faire des rapprochements entre les peuples Natemba et la langue ’’Nateni’’ du pays ; que parle le peuple actuellement, dans le massif montagneux de l’Atacora, au Bénin.
Selon l’auteur, nos langues sont pour notre histoire ce que l’Adn est aujourd’hui pour le corps humain, même si elles se forment et se déforment pour en créer de nouvelles. Ouvert à toute critique, Marcus Boni Teiga demande à être contredit avec des éléments probants sur ses approches, ses découvertes, ses analyses et ses interprétations. A l’en croire, la contradiction est comme le catalyseur indispensable pour faire avancer notre connaissance de l’histoire, car, réussir à décoder des langues, des événements, les us et coutumes des peuples d’un passé lointain, pour ensuite faire parler leur histoire, n’est pas une tâche aisée.
L’objet principal de son livre, rappelle-t-il, ne concerne pas les autres peuples voisins ou apparentés, mais, il s’agit pour lui d’apporter sa modeste contribution  à un pan de l’histoire africaine qui le concerne au premier chef, parce qu’il s’agit de son peuple, « Les Natembas ».


La méthodologie de travail

Journaliste professionnel et passionné d’histoire, N’piénikoua Marcus Boni Téiga a utilisé  les méthodes d’investigations journalistiques. Primo, il a localisé la zone d’investigation et rassembler toute la documentation se rapportant à cette zone et au sujet. Deuxio, il s’est rendu sur le terrain et a recueilli des informations, le plus possible, de première main. Tertio, il a étudié, analysé et comparé les informations minutieusement. Il a complété à tout cela, la connaissance géographique des pays, la comparaison linguistique, l’analyse sémantique ou sémiologique et le contexte historique. « Je suis profondément convaincu que, minutieusement étudiées, les sources traditionnelles dites « non-classiques » constituent des références crédibles. Le nom du peuple, sa généalogie, sa langue, son totem, ses différents rituels et fétiches sont autant d’éléments d’histoire, mais qui sont souvent muets pour ceux qui n’en sont imprégnés »,  s’est-il persuadé.


Contenu des chapitres

Dans le premier chapitre, l’auteur explique qu’on doit considérer, de façon générique, comme Nubiens, les descendants des anciens Nubiens qui habitent le Soudan, le Soudan du Sud, la Nubie Egyptienne, l’Ethiopie, la Somalie, l’Erythrée et la Libye. La Nubie originelle, selon lui, est décrite comme un territoire qui s’étendait des deux premières cataractes du Nil en Egypte jusqu’à Khartoum au Soudan, ou comme l’attribution à l’ensemble de l’Afrique, hormis l’Egypte pharaonique. Dans le deuxième, Marcus Boni Teiga affirme  que les différentes migrations humaines dont les premières datent de 70.000 ans, selon les scientifiques, seraient dues à la désertification et aux bouleversements sociopolitiques. Le troisième chapitre, en revanche, est celui dénommé : « La Nubie et le Gambela » ; il y montre que le premier royaume de ce qui allait devenir plus tard l’empire nubien de Kousch a été probablement construit autour de la ville de Gambela en Ethiopie. A l’origine, les Nubiens vivaient dans le système matrilinéaire qui est ensuite devenu patrilinéaire et, dans des sociétés acéphales. Du moment où une dynastie forte a réussi à constituer le premier royaume fédérant, par nécessité ou par force, plusieurs tribus, le système est devenu monarchique. C’est cette assertion qu’il a développée dans le quatrième chapitre.
Faisant le rapprochement entre la Nubie et l’Egypte, dans le cinquième chapitre, Teiga pense qu’il existe suffisamment d’éléments pour dire que la civilisation pré-dynastique en Egypte est d’origine nubienne avant d’être métissée. Selon cette affirmation, elle a probablement été progressivement métissée grâce à ses contacts avec  les autres peuples d’Asie, notamment, ceux-là même qui ont été établis bien plus tôt que nous n’en savons pour le moment. Il va plus loin : les Pyramides, qui sont aujourd’hui le symbole du génie et de la puissance des pharaons qui ont rivalisé dans leur construction, ne sont pas nées ex-nihilo, mais constituent le fruit d’une lente évolution intimement liée  aux us et aux coutumes de la Nubie antique, sur les principes de la vie, de la mort et de l’au-delà.
Le sixième chapitre, intitulé « Les conquêtes Nubiennes et les descendants de Nubiens en Afrique », explique que la conquête des territoires de l’ouest de la Nubie Soudanaise a été entamée plusieurs milliers d’années avant Jésus-Christ. Pour l’auteur, les recherches qu’il a menées entre le Tchad et le Bénin permettent d’établir que les Natembas, dont il est issu, sont des descendants des derniers conquérants du royaume de la Méroé, en Egypte. De nombreux éléments linguistiques, culturels et historiques l’attestent, a-t-il ajouté.
Dans le dernier chapitre intitulé « Les descendants de Nubiens de la Diaspora », l’auteur a affirmé que  tous les peuples noirs du monde, où qu’ils se trouvent, sont d’origine nubienne. Dans l’explication de cette affirmation, il a indiqué que leurs ancêtres lointains sont partis de la vallée du Nil pour s’installer en différents endroits du monde, par vagues successives, et à des époques différentes, selon les uns et les autres.


Sur l’unité de l’Afrique

Dans une démarche de panafricaniste, Boni Téiga croit que l’Afrique est naturellement et, par essence, la source de l’humanité. Les ramifications de la peau noire, retrouvée partout dans le monde, seraient dues à cette migration de la Nubie jusqu’en Afrique de l’Ouest, peu avant l’effondrement  du royaume de Méroé. A travers son ouvrage, il invite tous les peuples  noirs d’Afrique et de par le monde à s’unir, puisque la plupart des langues parlées au monde sont étymologiquement et d’origine africaine. Il est l’un de ceux qui croient que l’Afrique peut encore unir ses peuples qui ne devraient pas être divisés.


Hector Tovidokou





L’auteur

Marié et père d’un enfant, N’piénikoua Marcus Boni Téiga est le 21 mai 1966, à Tanguiéta, au Bénin. Il est titulaire d’un diplôme de Journalisme de l’Institut de Journalisme de Lagos, au Nigéria, de Reuters Fellowship Certificate, et de l'Université de Bordeaux 3 en France,  respectivement en 1990 et 1994. Il a collaboré à  West Africa Magazine (Grande Bretagne), Médias France Intercontinents, RFI, Africa International, Jeune Afrique Economie & Telex Confidentiel (France), La Presse de Montréal, The Globe and Mail (Canada), Haské, Le Paon Africain (Niger), Le Messager (Cameroun), Le Nouveau Parlement (Tchad). Il collabore actuellement à Courrier International, Ulysse magazine, Slateafrique.fr.
Il est co-auteur d’un ouvrage collectif : Journalisme 2.0 Nouvelles formes journalistiques, nouvelles compétences, édité par "La Documentation Française", en 2012. Il est aussi l’auteur d’un récit, Sambiéni, le roi de l’évasion, édité en 1995 par "Golfe Livres", d’un essai politique, Quelle démocratie pour l’Afrique ?, édité en avril 2000 par CERFOD, d’un recueil de poèmes, Magnificences de l’Atacora-Donga, édité en 2005, à compte d’auteur. Beaucoup d’autres ouvrages sont nés de sa plume : Kaba, le héros et la légende, Le faiseur de pluie de Tanguiéta, Comme si j’étais un espion : dans la guerre de la Côte-d’Ivoire, notamment.
Il a été lauréat de la Fondation Reuters en 1994. Actuellement, il dirige la Fondation Teiga, une Ong au service de l’éducation, de la culture, des sports et des loisirs.


 H. T.